artskop virginie ehonian africanlinks ishola akpo L’essentiel est invisible pour les yeux

Focus sur la série « L’Essentiel est invisible pour les yeux! » : 3 questions à Ishola Akpo

Ishola Akpo a documenté les cadeaux reçus par sa grand-mère lors de sa dot. Ces biens qu’elle a conservés se sont cristallisés autour de ses souvenirs, son identité d’épouse pour raconter des bribes de sa vie de femme.

La démarche de l’artiste est à la frontière du documentaire photographique et de l’art contemporain. En effet, il met l’accent sur cette tradition de la dot qui perdure aujourd’hui dans certaines régions du monde. Cette étape réalisée en amont de l’institution du mariage, est vue comme un rite qui implique les deux familles des mariés qui acceptent et accompagnent avec bienveillance cette union. A travers ces biens offerts, c’est la vie des futurs époux qui se construit et débute.

Comment Ishola Akpo a t-il réfléchi et conçu ce travail? Comment sa grand-mère a-t-elle appréhendé le travail de son petit-fils ?

Réponses de l’artiste.

Virginie Ehonian : Ishola Akpo, pour votre série L’essentiel est invisible pour les yeux (2014) vous avez choisi votre grand-mère comme modèle pour cette première partie de la série sur le thème de la dot. Comment votre collaboration s’est-elle déroulée? Comment a t-elle réagit à votre invitation? A votre projet? Quel a été l’élément qui vous a inspiré cette série photographique?

Ishola Akpo : En fait c’est ma grand-mère qui m’a demandé de la photographier ; elle a voulu avoir une photographie d’elle qui accompagnerait son testament. Je me suis dit que c’était le moment de l’immortaliser, de raconter son vécu et garder une trace d’elle dans la mémoire familiale. Dans un premier temps, j’ai commencé par une conversation avec elle, je lui ai demandé alors de me parler de mon feu grand père que je n’ai pas eu la chance de connaître et de me raconter leur histoire de mariage. Elle commença par me parler de son attachement à ce qui reste comme objets de sa dot, combien ceux-ci lui apportent de la joie en même temps de l’angoisse. C’est ainsi que je me suis intéressé à photographier ces objets qui sont l’évocation poétique d’un temps réel et essentiel : le mariage de ma grand-mère et sa vie avec mon grand-père, aujourd’hui disparu.

artskop virginie ehonian africanlinks ishola akpo L’essentiel est invisible pour les yeux
L’essentiel est invisible pour les yeux, 2014 print on baryta paper, 60 x 90 cm 
© ishola akpo
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L’essentiel est invisible pour les yeux, 2014 print on baryta paper, 60 x 90 cm 
© ishola akpo

Virginie Ehonian : La dot tient un rôle important dans l’institution du mariage dans beaucoup de pays du continent africain. Qu’en est-il au Bénin, votre pays d’origine ? Quel est votre regard sur la dot, vu que vous avez vécu dans différents pays ?

Ishola Akpo : La dot est le fondement traditionnel du mariage. C’est une institution chargée des récits d’une tradition centenaire, avec tous ses principes et règles. Mais cette tradition perd progressivement sa signification symbolique pour le mariage. Pour certaines familles, dans certains cas, cela est même devenu une forme d’enrichissement personnel. Certains parents de futures épouses l’utilisent pour extorquer de l’argent à des prétendants en mariage. Que cela nous plaise ou non, les mariages du futur sur le continent africain se situent entre tradition et modernité et vont changer les récits individuels et collectifs qui y sont racontés. Heureusement, il y a des familles qui adhèrent encore à la pratique ancienne du prix de la mariée.

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L’essentiel est invisible pour les yeux, 2014 print on baryta paper, 60 x 90 cm 
© ishola akpo
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L’essentiel est invisible pour les yeux, 2014 print on baryta paper, 60 x 90 cm 
© ishola akpo

Virginie Ehonian : Votre grand-mère Dossi est mise à l’honneur pour le 1er volet de cette série. Quelle suite aspirez-vous à donner à L’essentiel est invisible pour les yeux?

Ishola Akpo : La suite que je souhaiterais donner à ce projet, serait de  continuer par montrer ce travail qui est une expérience subjective et invisible.

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L’essentiel est invisible pour les yeux, 2014 print on baryta paper, 60 x 90 cm 
© ishola akpo
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L’essentiel est invisible pour les yeux, 2014 print on baryta paper, 60 x 90 cm 
© ishola akpo

 

Propos recueillis par Virginie Ehonian.

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Virginie Ehonian

Editrice de contenus pour africanlinks.net ; Fondatrice de  Nooru Box.

Particulièrement sensible à l’art contemporain, mes intérêts convergent vers de nouvelles façons de promouvoir les différents patrimoines africains, entre héritage et modernité.

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En + :

http://www.isholaakpo.com/

L’Essentiel est invisible pour les yeux! (2014) est une série photographique de l’artiste Ishola Akpo présentée actuellement au Weltkulturen Museum de Frankfurt pour l’exposition ‘Grey is The New Pink’. (25 Octobre 2018 – 1er Septembre 2019)

Ishola Akpo Vit et travaille à Cotonou, Bénin

Crédit photo © Ishola Akpo, L’Essentiel est invisible pour les yeux! (2014)

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