La 1-54 Contemporary African Art Fair s’implante sur le sol français

Roméo Mivekannin, Le Village Sénégalais à la Porte Maillot, 2020. Acrylique et bain d'elixir sur toile libre 313 x 271 cm. © Galerie Cécile Fakhoury 1-54 Contemporary African Art Fair powered by Christies in paris
Roméo Mivekannin, Le Village Sénégalais à la Porte Maillot, 2020. Acrylique et bain d’elixir sur toile libre 313 x 271 cm. © Galerie Cécile Fakhoury

Comme chaque année, c’est à Marrakech que la célèbre 1-54 Contemporary African Art Fair aurait dû se dérouler au mois de Février. Étant donné les circonstances de l’épidémie, elle dépasse ses propres limites et ouvre ses portes de manière hybride – pour la première fois, dans les lieux de Christie’s Paris pour les VIPS à partir du 18 janvier, et pour tout public en ligne (www.christies.com) du 20 au 23 janvier 2021

La foire spécialisée dans les arts contemporains de l’Afrique et de sa diaspora sera prête à ouvrir ses portes à un public français, avec des mesures de sécurité adaptés pour cet évènement. 

« À la suite du report de l’édition de Marrakech dû aux régulations liées à la crise sanitaire, nous avons réfléchi à de nouvelles idées afin d’apporter plus de soutien à nos galeries et artistes, dans ces moments difficiles. Nous avons réalisé que nous devions aller au-delà de notre modèle établi et saisir l’opportunité de forger un partenariat avec Christie’s Paris. C’est donc une édition unique qui est née de circonstances exceptionnelles. » [1]

Elle offre donc sa plateforme pour 21 galeries de renommée internationale, principalement d’Afrique et d’Europe, exposant 68 artistes, incluant : Galleria Continua, Galerie Anne de Villepoix, Luce Gallery, Nil Gallery, Gallery 1957, This Is Not A White Cube, Galerie MAGNIN-A et Galerie Lelong & Co, entre autres. 

Kelani Abass, Scrap of Evidence (Ariyo) 2020. Techniques mixtes sur bois (typographie, huile sur toile, impression numérique, cadre ancien, bloc de caoutchouc). 34 x 37 cm 1-54 Contemporary African Art Fair powered by Christies in paris
Kelani Abass, Scrap of Evidence (Ariyo) 2020. Techniques mixtes sur bois (typographie, huile sur toile, impression numérique, cadre ancien, bloc de caoutchouc). 34 x 37 cm

Cette fois-ci, le programme d’exposition aura également une place internationale importante car disponible en intégralité sur le site internet de Christie’s, permettant l’achat et la livraison d’œuvres dans le monde entier. 

« Plus que jamais, nous sommes déterminés à créer une plateforme dédiée aux artistes contemporains venant d’Afrique et de sa diaspora en défiant les stéréotypes qui subsistent envers les artistes et venant d’institutions culturelles occidentales, en encourageant des pratiques d’acquisition durables et engagées. À présent, nous le faisons à petite échelle et dans un format qui est plus adapté à la situation actuelle. » [2]

1-54 se veut également d’être une plateforme aux récits pluriels en démontrant une diversité d’interprétations identitaires, les visiteurs auront la chance d’y découvrir ou redécouvrir le travail de Marie-Claire Messouma Manlanbien chez 50 Golborne. Son travail dénote un syncrétisme culturel entre la France, la Guadeloupe et la Cote d’Ivoire. Elle créée des représentations hybrides des rites et des cultures, au sein de ses installations aux mediums variés, allant du textile au bois, et du cuivre à l’argile. 

Une contribution nord-africaine cruciale avec la galerie casablancaise Loft Art Gallery qui présentera la photographie éclectique Mous Lamrabat, celle documentaire de M’hammed Kilito, en passant par celle de l’artiste et photographe ivoirienne Joana Choumali

Cette dernière dépeint le monde africain qui l’entoure au quotidien, à travers la photographie, lors de ses voyages, ou de scènes locales de sa ville natale Abidjan, où l’artiste vit actuellement. Ses explorations s’approfondissent à travers l’usage de textiles colorés cousus sur ses photographies même. Une pratique de la couture devenu un processus méditatif clé à la production de son travail. 

À ne pas manquer à l’appel la présence de Nú Barreto chez la Galerie Nathalie Obadia. L’artiste offre un regard grave sur l’Afrique en se concentrant sur les inégalités, discrimination et systèmes oppressifs qui s’y inscrivent, à travers le dessin, la peinture ou encore la vidéo. Une pratique artistique des plus pertinentes par son articulation critique de problématiques actuelles. 

Nú Barreto Bailleurs Pro-Fonds (États Désunis d’Afrique) 2018 Acrylic on canvas, structure (3 wooden poles) 270 x 200 x 100 cm 1-54 Contemporary African Art Fair powered by Christies in paris
Nú Barreto, Bailleurs Pro-Fonds (États Désunis d’Afrique) 2018
Acrylique sur toile, structure (3 poteaux en bois) 270 x 200 x 100 cm. © Galerie Nathalie Obadia

Et pour finir, un passage des plus importants par la Galerie Cécile Fakhoury pour apercevoir le travail de l’artiste plasticien Roméo Mivekannin, qui travaille en proximité avec la photographie de type ethnographique et de peintures classiques du 19ème siècle, une époque des plus emblématique dans l’articulation d’un discours sur « l’Autre » dans un contexte déshumanisant de la traite de l’esclavage et d’un colonialisme violent et ravageur. Ces travaux d’acrylique sur toile de bain d’élixir allient fortement le collage de ces deux systèmes de représentations du corps noir, des représentations faisant écho à l‘hier et l’aujourd’hui. 

Parallèlement, c’est au sein du programme en ligne du Forum 1-54 que le Maroc sera davantage présent. Intitulé Crafting wor[l]ds : for a vernacular economy of art, il se tiendra pendant la foire ainsi que pendant tout le mois de Février. Un programme commissarié par Le 18, une « plateforme indépendante de création, de diffusion et d’échanges culturels et artistiques basé à Marrakech » [1] et également diffusé dans ces lieux.  

Lerato Motaung Knowledge 2020 Oil on canvas Hand signed by artist (lower right) 150 x 187 cm
Lerato Motaung, Knowledge, 2020. Huile sur toile. Signée de la main de l’artiste. 150 x 187 cm. © Thk Gallery

La plateforme discursive de la foire est un programme fondamental pour la contextualisation des discours artistiques, culturelles, politiques et sociaux de la scène d’art contemporain africaine, par ces acteurs principaux. Le programme se concentrera sur les thèmes de résonance, celle des « nouvelles pratiques culturelles qui sont en train d’émerger ayant pour inspirations des principes vernaculaires et des dynamiques circulaires » [2] qui se rejoignent peu importe leurs localités.  

Barthélémy Toguo Partage VIII 2020 Ink on canvas 200 x 200 cm 1-54 Contemporary African Art Fair powered by Christies in paris
Barthélémy Toguo, Partage VIII 2020. Encre sur toile. 200 x 200 cm. © Galerie Lelong and Co.

Une proposition de programme avec des collaborateurs proches du 18 qui dévoilera « des lignes divergentes, convergentes et qui s’intersectent afin d’explorer les sites et infrastructures matérielles et immatérielles de la production culturelle, économique, de sa reproduction et circulation tout en établissant un protocole diffus de commissariat qui compose [leur] réseau ». [3]

Pour cette édition inédite, la 1-54 s’implante donc sur le sol français, ayant pour similarité la foire d’AKAA (Also Known As Africa) et au sein de la saison AFRICA 2020 (maintenant 2021) entre autres – des initiatives des plus nécessaires pour la visibilité, et plus important, le besoin de renforcer les discours artistiques et culturels africains dans le paysage de la culture en France. 


[1] [2] Citation issue d’une conversation par email avec Touria El Glaoui, Fondatrice de 1-54 Contemporary Art Fair.

[3] Cette citation provient du site internet de Le 18, disponible ici.

[4] [5] Cette citation est issue du site internet de la foire, disponible ici.

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À propos de l’auteur

Cindy Sissokho

Cindy Sissokho est une productrice culturelle, commissaire d’exposition et écrivaine avec un intérêt particulier sur les aspects intellectuels, politiques et artistiques de la decolonialité dans les arts et les mouvements et écrits féministes. Son travail se nourrit de sa passion pour la diffusion des connaissances et nouvelles productions culturelles provenant des ‘Pays du Sud’, en tant qu’espace de pensée politique. Elle travaille en tant que commissaire d’exposition et productrice culturelle au New Art Exchange à Nottingham (UK).

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